2011-02-24

"Avec Bruxelles, il est urgent d'attendre" - un témoinage peu crédible du CEO de Fenaco

« Je veux une agriculture productrice et compétitive » a déclaré dans une interview à l’Hebdo Monsieur Willy Gehriger, directeur de la coopérative agricole Fenaco, pour continuer un peu plus loin : « La politique agricole commune se trouve dans une impasse et dans les faits, l’UE est loin de se diriger vers une agriculture axée sur la durabilité. Avec Bruxelles, il est urgent d’attendre ».


Fenaco, « une entreprise des paysans suisses » avec un chiffre d’affaires qui dépasse les 5 milliards de CHF, est devenue le premier acteur an amont et un acteur très important en aval de la production agricole en Suisse et par cela un partenaire incontournable pour beaucoup d’exploitations agricoles. C’est dans notre système économique une performance extraordinaire et on ne peut que féliciter les responsables de Fenaco de cet impressionnant succès. Il est tel que dans beaucoup de secteurs le groupe frise une position de monopole ou au moins une position de dominance du marché. La position économique de Fenaco est justifiable, voire souhaitable en vue de la participation de l’agriculture suisse au marché européen. Elle est pourtant très problématique si l’ouverture des marchés agricoles vers l’UE, déjà partiellement réalisée avec succès, reste inachevée. En effet, dans la situation actuelle, spécialement pour les secteurs d’activité de la Fenaco qui sont toujours partiellement protégés, les rentes de situation sont importantes. On comprend que la défense politique du statu quo et la défense des acquis sont prioritaires pour l’entreprise. Son CEO se prononce donc avec une régularité et un engagement impressionnants contre l’accord de libre échange dans le secteur agroalimentaire, malheureusement sans présenter d’alternatives valables et en prétendant défendre les intérêts de l’agriculture suisse. C’est pourtant cet accord agricole qui permettra à l’agriculture suisse de remplir sa mission productrice, valeur fondamentale du groupe, valeur pour laquelle s’engage Fenaco d’après son site internet avec «… une grande éthique et de la responsabilité… ».

Le manque de stratégie durable de la politique agricole commune (PAC) et dans ce contexte l’impasse dans laquelle elle se trouve, est dans cet article l’argument avancé contre la politique du Conseil fédéral. L’argumentation ne nous semble pas pertinente pour les raisons suivantes :

- L’accord libre-échange du secteur agroalimentaire (ALEA) ne nous oblige pas à reprendre la politique agricole commune (PAC). Nous restons autonomes pour définir notre politique agricole, notamment pour l’organisation des paiements directs et des soutiens aux améliorations des bases de production.

- Si effectivement l’orientation de la production agricole en UE s’éloignait de l’objectif de la durabilité (un avis de la Fenaco que nous ne partageons pas), cela signifierait un atout supplémentaire pour nos produits suisses, et sur le marché suisse et sur le marché européen. En effet, les consommateurs en UE comme en Suisse sont toujours plus sensibles et exigeants quant au respect des critères de durabilité pour la production de denrées alimentaires.

Conclusion : L’ALEA reste la meilleure alternative pour le maintien et le développement du secteur agroalimentaire suisse.

Hans Burger, février 2011